Les agents ont su faire face

Olivier Dussopt, revient pour les lecteurs de la Quotidienne, sur la gestion concrète de la crise au sein des services publics. Le déploiement inédit et extrêmement rapide du télétravail à une échelle jamais tentée auparavant demeure pour lui le symbole de la capacité d’adaptation et d’innovation des agents, à conserver parmi les acquis positifs d’une crise qui n’a pas empêché l’État d’assurer la continuité de ses missions essentielles. Saluant l’engagement des administrations et également des élèves des écoles de service public, qui se sont portés volontaires dès le début du confinement, le Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics annonce préparer dès le mois de juin un premier bilan de la gestion de crise dans la fonction publique, en concertation avec les employeurs publics et les organisations syndicales, afin de tirer les leçons en vue de futures crises tout autant que continuer à s’adapter aux enjeux et aux contraintes d’un environnement sans cesse changeant.

Interview d'Olivier Dussopt, Secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics

 

Institut de l’Entreprise – Comment la fonction publique s’est-elle organisée pendant cette crise sanitaire et économique ? 

Olivier Dussopt Pendant cette crise inédite, la mobilisation et l’engagement des agents publics ont été exemplaires afin d’assurer la continuité des services publics sur tout le territoire. La permanence indispensable de l’Etat s’est appuyée sur une organisation et une capacité d’adaptation rapide des services à tous les niveaux. Dans chaque administration, un plan de continuité d’activité (PCA) est préparé pour faire face aux crises majeures. Il a donc été mis en œuvre sans délai dès le 16 mars par le chef de service pour les missions jugées indispensables. Dans ce cadre, les agents devant travailler en présentiel sur leur lieu de travail ont appliqué strictement les mesures de sécurité et de protection sanitaire. La majorité des agents a poursuivi efficacement son activité en télétravail, celui-ci devenant la norme d’organisation des services chaque fois que cela était possible. Les agents ne relevant pas d’un PCA ou dont l’activité ne permettait pas de télétravailler, ont bénéficié d’une autorisation spéciale d’absence (ASA).
Ces dispositions ont été mises en œuvre dès le début du confinement et ont été maintenues pour partie depuis le 11 mai, dans le cadre de la reprise progressive d’activité. 
Dans le domaine de la formation, les écoles de service public se sont également organisées pour assurer la formation à distance de leurs élèves et développer des solutions dématérialisées innovantes. 
Les administrations ont démontré qu’elles étaient en capacité de faire face et de s’adapter dans l’urgence. S’il en était besoin, la gestion de la crise témoigne de leur rôle essentiel et continu au service des usagers. 

 

Estimez-vous que les services publics ont été assurés pendant cette période ? Qu’avez-vous mis en place pour favoriser l’agilité des organisations en pareille circonstance ?

Que ce soit en présentiel ou en télétravail, la mobilisation a été à la mesure de cette crise d’une ampleur sans précédent dans l’histoire de notre pays. Une prime exceptionnelle sera versée aux agents les plus mobilisés dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, afin de reconnaître ce surcroît de travail pour assurer la continuité des services publics. 
Je tiens aussi à saluer l’engagement des élèves des écoles de service public qui se sont portés volontaires dès le début du confinement pour soutenir les services de l’Etat. Des conventions de mise à disposition ont été formalisées et très vite mises en place. Leur renfort a été précieux et apprécié. Ces jeunes représentent le visage de l’administration de demain et c’est de cette administration solidaire et engagée au service de nos concitoyens, dont nous avons besoin. 
La mise en place de modes d’organisation du travail propres au contexte de crise (plans de continuité d’activité, télétravail quasi généralisé) a impliqué un accompagnement renforcé des employeurs et des agents des services de ressources humaines. La direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) a construit des éléments de doctrine dans des délais très courts, mais a aussi assuré un rôle de conseil, de coordination et d’harmonisation des pratiques de gestion des ressources humaines pendant cette période. La situation étant inédite, il était nécessaire de préciser et d’adapter le cadre juridique avec une grande réactivité, d’apporter des réponses rapides aux très nombreuses questions soulevées par les employeurs publics. 

 

Comment avez-vous accompagné la mise en place de ce télétravail ?

L’accompagnement a également porté sur le télétravail, déployé de façon massive. Des agents n’avaient jamais télétravaillé avant le confinement. D’autres le faisaient régulièrement, un à deux jours par semaine. Des managers ont eu à encadrer des équipes complètes à distance et cela ne s’improvise pas du jour au lendemain. Pour que chacun puisse s’adapter et vivre le télétravail confiné dans les meilleures conditions possibles, des guides, outils pratiques, webinaires, webconférences ont été proposés. Ministères et collectivités se sont emparés de la question : de très nombreux outils pertinents ont été produits en un temps ramassé pour aider les agents confrontés à cette situation exceptionnelle. Dans quelques ministères, des actions innovantes ont été développées, telles que le « coaching flash » de cadres, c’est-à-dire des séquences courtes de coaching par téléphone ou en visioconférence pour les accompagner dans les périodes de confinement et de déconfinement à manager au mieux leurs équipes.
Des outils numériques ont été également déployés pour faciliter le télétravail des agents et la collaboration à distance : plusieurs d’entre eux ont été développés par la direction interministérielle du numérique, comme Tchap, la messagerie instantanée de l’Etat, ou encore le service de webconférence de l’Etat. 
L’ensemble de ces actions et dispositifs restera un acquis et fait partie des enseignements positifs à tirer de la crise. 


Quels types d’activités avez-vous privilégié (plan de continuité des activités ou service partiel) ? Quels ont été vos critères ?  

Les plans de continuité d’activité (PCA) élaborés par chaque administration, relèvent du pouvoir du chef de service à qui il appartient de prendre les mesures nécessaires au bon fonctionnement de son service. Les PCA visent à s’assurer, en cas de circonstances exceptionnelles, du maintien des missions jugées fondamentales à la continuité du service public. Il s’agit donc de prévoir une stratégie de continuité pour l’organisation concernée afin d’assurer que les services vitaux maintiennent en permanence leurs activités à un niveau minimum socialement acceptable.
Le PCA prévoit notamment la liste des postes indispensables au maintien de l’activité ou du service en mode de fonctionnement dégradé. Il identifie les agents aptes à les occuper et leurs conditions d’emploi (activité en présentiel, télétravail, etc.).  
Il n’existe pas de critères légaux ou réglementaires pour définir le périmètre des services publics indispensables ou ce que recouvre la notion de missions jugées indispensables.


Une cellule d’écoute et de soutien psychologique aux chefs d’entreprise a été mise en place par Bercy. Existe-t-il des initiatives comparables dans le cadre de la fonction publique ? 

Les agents publics bénéficient aussi de cellules de soutien psychologique, mises en place par leurs employeurs. Elles sont disponibles par téléphone 7j/7 et 24h/24 et sont maintenues dans le cadre du déconfinement progressif. Les psychologues peuvent proposer un suivi de l’agent, si un seul échange téléphonique ne suffit pas.  


Que révèle cette crise pour vous par rapport à la mission du service public et quels sont les enjeux qu’elle soulève ?

Cette crise confirme que nous avons une administration de grande qualité, ayant une forte capacité d’adaptation et d’innovation. Les agents ont su faire face, se réorganiser complètement, avec parfois des outils et des méthodes qu’ils ne maîtrisaient pas. Et malgré cette situation hors normes, les services ont fonctionné, et même bien fonctionné. 
Ce qui a été mis en place, doit être capitalisé et rester un acquis pour l’avenir dans la gestion d’éventuelles futures crises, que celles-ci soient de nature sanitaire ou autre. 
Il nous faut retenir le plus constructif de cette crise afin de faire évoluer les organisations, les modes de management et de permettre à l’administration de s’adapter aux enjeux et aux contraintes d’un environnement sans cesse changeant. 
Cela ouvre de nombreuses pistes de réflexions pour l’avenir.
Dès fin juin, nous préparerons un premier bilan de la gestion de la crise dans la fonction publique avec les employeurs publics et les organisations syndicales. Ce sera l’occasion de partager collectivement les enseignements de cette crise. 

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