La crise que nous traversons impacte tous les secteurs de l’économie, y compris l’industrie de l’énergie, en témoigne le cours du baril de pétrole passé sous la barre des $20 pour la première fois depuis 2002. Le secteur des énergies renouvelables ne fait pas d’exception. Alors que la transition vers des sources d’énergies renouvelables est une voie vers la souveraineté énergétique des États et vers une plus grande autonomisation et résilience des territoires, quel impact la crise actuelle aura-t-elle sur leur développement ? Les énergies renouvelables peuvent-elles nous protéger face aux crises actuelles et futures ? La transition énergétique peut-elle être menacée par cette crise sanitaire ? C’est à ces questions que Vincent Balès, Directeur de wpd offshore France et auditeur de la 20ème Session Annuelle de l’IHEE, répond pour la Quotidienne des Entreprises en Action.

Interview de Vincent Balès, Directeur de wpd offshore France* et Auditeur IHEE* de la Session Annuelle 20 « Les défis de la transition énergétique »

 

Institut de l'Entreprise - Comment réagit votre secteur économique, celui des énergies renouvelables, à la crise du COVID ?

Vincent Balès - Il convient tout d’abord de souligner la résilience du secteur, pour les installations électriques en fonctionnement. En effet, l’éolien et le photovoltaïque sont des sources d’énergie autonomes : elles ne nécessite pas de pilotage in-situ, pas de chargement de combustible, pas d’équipe sur place. La gestion de ces parcs est essentiellement réalisée à distance, les interventions in-situ sont exceptionnelles et limitées à quelques opérations de maintenance. Cette crise permet donc de souligner un atout indéniable des énergies renouvelables : leur autonomie.

Concernant les projets en cours, notamment ceux qui sont au stade de financement ou de construction, la problématique est identique aux autres secteurs industriels. D’une part le secteur bancaire, très impliqué dans les projets renouvelables qui nécessitent un apport significatif en capitaux, redouble de prudence dans un tel contexte de crise ; cela conduit à freiner, dégrader voire annuler des opérations de financement, engagées avant la crise. D’autre part, les industriels commencent à être touchés par les difficultés d’approvisionnement et les mesures de confinement, cela conduit à retarder des chantiers, voir des livraisons de projets.
Donc en résumé, une production d’énergie renouvelable résiliente, mais des réalisations de projets subissant les mêmes impacts que les secteurs industriels traditionnels.

 

Comment votre organisation s’est-elle adaptée aux contraintes imposées par cette crise, en particulier le confinement de la population ?

Malgré la rapidité et l’ampleur des décisions que l’État a mis en place pour faire face à cette crise, nous nous en sommes plutôt bien sortis.
Une grande partie de notre activité (développement et gestion de projet, engineering…) est compatible avec le format « home-office », certains collaborateurs le pratiquaient déjà avant la crise. De plus, l’ensemble des équipes ont les outils pour travailler à distance (portables, vpn…).
Mais au-delà des outils, il faut aussi veiller à créer une dynamique de travail à distance : s’assurer de ne laisser personne de côté, de communiquer suffisamment pour que les orientations et les décisions soient partagées, comprises, suivies. Les managers doivent accepter un peu plus de « lâcher-prise » et les équipes un peu plus d’initiative. Deux défis, qui permettront de faire progresser l’organisation, une fois la crise passée.
Certains rituels d’équipe prennent également une autre dimension dans cette crise : chez wpd, nous avions mis en place depuis quelques années un « debriefing d’équipe hebdomadaire », en utilisant un excellent outil, Klaxoon. 30 minutes, chaque vendredi, permettant à chacun de faire le point sur sa semaine, de partager avec l’équipe sa « météo » de la semaine, les bugs éventuels (tant internes, qu’externes), et une catégorie plébiscitée : le « weekly kiff », qui est un moment coup de cœur (signature de contrat, succès en appel d’offres ou plus simplement une belle rencontre ou la découverte d’un lieu à partager). Et la réunion la plus riche de ces trois dernières années a eu lieu vendredi dernier : après notre première semaine de confinement, chacun a trouvé dans ce « weekly debrief » un moment pour souffler, prendre du recul sur la situation, partager ses émotions, échanger des bonnes idées… il va sans dire que nous veillerons à tenir ce rendez-vous encore longtemps !

 

Comment vous projetez-vous sur l’après-crise ?

Ce n’est pas évident de se projeter d’ores et déjà sur l’après, nous ne connaissons pas encore la longueur de la course ni son dénivelé…
Mais je constate depuis le début de cette crise, l’importance et la fragilité de la communication interne. L’importance, car nous n’avons jamais eu, depuis deux semaines, autant de réunions internes, comme un besoin prégnant de se rassurer en échangeant au sein de l’équipe. Mais aussi la fragilité, car l’email est encore trop présent et génère encore plus de malentendus voir de tensions, dans une équipe confinée. Cette période doit être l’occasion de nous remettre en question sur nos modes de communication professionnels, c’est un sujet sur lequel je vais essayer de faire évoluer mon organisation.

 

Vincent Balès, Directeur de wpd offshore France et actuellement auditeur de l'IHEE* Session Annuelle 20 « Les défis de la transition énergétique »

Deux sujets ont orienté son parcours : la mer et l’énergie.

La mer, par ses origines bretonnes, il y est naturellement attaché. Lorsqu'il découvre l’annonce des Chantiers de l’Atlantique, à sa sortie d’école d’ingénieurs, pour construire des paquebots à Saint-Nazaire forcément, il signe. Après deux très belles années, sa femme architecte parisienne l’incite à rejoindre Paris… mais il arrive à garder un pied dans l’eau, en rejoignant Technip et l’offshore pétrolier. Là encore il vit une excellente expérience professionnelle, jusqu’à ce que des aspirations personnelles le poussent à faire sa transition énergétique à 30 ans, et rejoindre le monde des énergies renouvelables.
D’abord chez un fabricant d’éoliennes, leader de l’éolien terrestre qui souhaitait développer un projet d’éolienne offshore, malheureusement interrompu ; puis chez wpd, pour prendre la direction de wpd offshore France, et ainsi combiner la mer et l’énergie, dans un défi complexe de développer des projets d’éoliennes en mer au large des côtes françaises !


*wpd offshore France : Créé en 2007, wpd offshore France développe des parcs éoliens au large des côtes françaises situés aussi bien sur la façade Manche-Mer du Nord que sur la façade Atlantique. Ils ont tous été définis en étroite collaboration avec les élus locaux, les associations de protection de l’environnement et l’ensemble des usagers de la mer, notamment les pêcheurs. L’ensemble de ces projets représente une puissance totale potentielle de 2 500 MW. Wpd offshore France et son partenaire Eolien Maritime France ont remporté en 2012 le 1er appel d’offres Eolien en Mer lancé par l’état pour les parcs de Courseulles-sur-Mer et de Fécamp. Une fois mis en service, les deux parcs totaliseront une puissance de 948 MW, permettant d’alimenter 1,47 millions de foyers en énergie d’ici 2023. 

*IHEE : Institut des Hautes Etudes de l'Entreprise. Pour en savoir plus, c'est ICI

 

 

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