Jean Flamand, Cécile Jolly, Martin Rey du Département Travail, Emploi, Compétences de France Stratégie ont analysé les conséquences de l’épidémie de la Covid-19 sur les conditions de vie et de travail des Français. Ils ont dressé un panorama des vulnérabilités économiques et sociales des métiers.

Jean Flamand, Cécile Jolly et Martin Rey, les trois auteurs de l’étude sur Les métiers au temps du corona publiée par France Stratégie, n’analysent pas les conséquences du confinement de l’économie sur l’emploi. Leur objectif est d’« éclairer par petites touches les vulnérabilités de celles et ceux qui travaillaient avant le 17 mars et que la crise sanitaire et le confinement ont contraint à cesser, à ralentir ou au contraire à poursuivre, parfois de manière effrénée, leur activité ». La Quotidienne des Entreprises En Action en publie des extraits. 

La note dresse une typologie inédite des métiers dans la crise en cinq groupes. Les métiers que l’on peut qualifier de « vulnérables de toujours » forment le premier groupe. Ils conjuguent une difficulté à travailler à distance et des statuts souvent précaires (une personne sur cinq exerce en CDD ou en intérim). Ces 4,2 millions de travailleurs, majoritairement des hommes, artisans et ouvriers de l’industrie et du bâtiment, sont traditionnellement confrontés à des conditions de vie et de travail difficiles. 

Le second groupe est formé par les « nouveaux vulnérables » (4,3 millions d’emplois). Ces personnes affrontent une crise inédite liée à l’exercice même de leur métier qui les met en contact avec le public. Leurs activités sont ralenties, voire interdites, et leur statut les fragilise (31% de contrats intermittents ou d’indépendants en solo). Les personnes qui exercent dans les métiers du transport, de l'hôtellerie-restauration, des services aux particuliers, de l’art, de la culture et du sport, sont vulnérables sur le plan financier et n’ont aucune certitude sur leur avenir. 

Le troisième groupe comprend les 10,4 millions de professionnels directement ou indirectement sur le « front » dont les activités apparaissent essentielles en cette période de crise. Ce sont tous les métiers de la santé, de l’éducation, de la propreté, de l’alimentaire, de la distribution, et les professions régaliennes. Peu fragilisés économiquement, ils sont exposés à la maladie à cause de leur contact direct avec le public pour les trois quarts d’entre eux. Parmi les plus mal rémunérées et davantage occupées par des femmes, ces professions vivent une intensification de leur travail.

Le quatrième groupe est celui des télétravailleurs exposés à un nouveau risque d’hyperconnectivité (3,9 millions d’emplois). Essentiellement occupées par des cadres, ces professions doivent, à distance, assurer la continuité du travail et préparer la reprise d’activité. Elles éprouvent plus de difficultés à équilibrer travail et vie privée.

Enfin, nombre de professions intermédiaires ou d’employés qualifiés (4 millions d’emplois), le plus souvent en inactivité partielle, sont protégés du licenciement à court terme par leur statut. Mais leur difficulté à télétravailler les expose à des risques d’éloignement de la sphère professionnelle et de désocialisation. 

Les auteurs observent que télétravailler confiné est plus difficile pour ceux qui vivent dans des appartements de grandes villes, plus exigus en moyenne en raison du prix du foncier, et qui ont la charge, à plein temps du fait de la fermeture des écoles, d’au moins un enfant de moins de 15 ans. 

Les populations concernées sont souvent des cadres soumis à une conciliation entre vie familiale et vie professionnelle plus difficile qu’en temps normal. Elles sont confrontées à une intensité du travail, une hyperconnectivité et une charge mentale qui peuvent être redoublées. 

En période de confinement, les métiers de cadres sont exposés à un risque économique faible : leur capacité à travailler à distance en mobilisant les outils numériques (38% travaillent habituellement à leur domicile contre 20% dans l’ensemble des métiers) et leur statut d’emploi (près de 90% sont en CDI ou indépendants avec salariés) leur permettent de continuer d’assurer leurs responsabilités professionnelles.

La difficulté d’organiser l’effort collectif de travail à distance et la tendance à l’hyperconnectivité pour répondre aux urgences peuvent entraîner une dégradation de leurs conditions de travail. 

Or les cadres supportent déjà les plus fortes intensités de travail et de charge mentale en France. Avant même le confinement, 81% des cadres et jusqu’à 86% des cadres des transports et de la logistique déclaraient avoir des quantités de travail excessives, contre 64% pour l’ensemble des professions. Ils étaient également près de la moitié à affirmer devoir travailler sous pression (50% contre 34% pour l’ensemble des professions). 

La vulnérabilité des cadres pourrait s’accroître dans les prochains mois, compte tenu des difficultés économiques des secteurs où ils travaillent. Un nombre significatif d'entre eux est recruté par des entreprises dont les activités sont très sensibles aux cycles (industrie, bâtiment, services).

Retrouver l'étude : ICI

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