À nous, Entreprises, de faire preuve d’un esprit collectif

Face à une crise sanitaire devenue également crise économique, Geoffroy Roux de Bézieux, président du Medef, en appelle à l’unité, à la solidarité et à la détermination, pour qu’aux côtés des pouvoirs publics et de la communauté médicale, les entreprises puissent pleinement prendre leur part. Pour cette première édition de La Quotidienne des Entreprises en Action, Geoffroy Roux de Bézieux nous donne son point de vue sur la crise en cours et sur les priorités du moment.

Institut de l’Entreprise - Geoffroy Roux de Bézieux, merci d’avoir accepté d’ouvrir la première Quotidienne des Entreprises En Action. Comment voyez-vous la situation des entreprises en France dans le contexte du Covid19 ?

Geoffroy Roux de Bézieux - La situation est très compliquée pour tout le monde. La lutte contre le Covid19 et le confinement ont entraîné la mise en veille de nombreuses activités. Plus de 400 000 salariés sont au chômage partiel. L'industrie tourne à 50% de sa capacité. Et nos entreprises, grandes ou petites, font face à d’intenses difficultés de trésorerie. Ce n'est pas la même crise qu'en 2008. Cette fois-ci, c’est d’abord l’économie réelle qui subit la tempête de plein fouet, donc il faut s’attendre à un effet de récession.

Quelle est la priorité dans ce contexte ?

Ma priorité à ce stade, c’est de faire en sorte que notre économie ne s’arrête pas. Il est primordial pour notre pays que les entreprises continuent de produire, à la fois pour participer à l’effort médical national, et à la fois pour faciliter la sortie de crise. Il ne faut pas que nous ajoutions une crise de carence à la crise sanitaire. D’autre part, nous devons adapter nos stratégies sans tabou pour soutenir les activités stratégiques. Certains groupes, dans le domaine du transport par exemple, n’ont plus de chiffre d’affaires ; dans un tel cas, il est légitime que l’État intervienne.

Pour permettre aux entreprises de maintenir leur activité malgré le confinement, il faut réunir les conditions sanitaires. Où en est-on de ce point de vue ?

Je veux d’abord saluer le courage de ceux qui continuent de travailler sur le terrain. Les personnels de santé sont en première ligne, mais ils ne sont pas les seuls à être exposés : il y a aussi les salariés qui font tourner les sites industriels et les services essentiels. Toutes les entreprises ou c’est possible doivent examiner sans délai les aménagements nécessaires aux postes de travail pour permettre la sécurité sanitaire des salariés et la poursuite de l’activité. La solution se trouve secteur par secteur avec les entreprises, les partenaires sociaux et les pouvoirs publics. Dans les entreprises, je peux vous dire que le dialogue social tourne à plein. Cela va dans le sens de l'union sacrée. Pour vaincre le Covid19, on doit tous y travailler.

Voyez-vous des choses positives dans la situation que nous traversons ?

Une telle crise nous demande de faire ressortir le meilleur de nous-mêmes. Je vois de beaux exemples de solidarité se mettre en place, au travers des dons de masques par exemple, ou encore des accords entre clients et fournisseurs. Il faut de la solidarité et ne pas augmenter les délais de paiement. Les banques ont été assez formidables dans l'ensemble. Cette crise est un défi pour notre génération : à nous, entreprises, de faire preuve d’un esprit collectif.

Quel est votre état d’esprit à ce stade de la crise ?

Je suis inquiet mais confiant. C’est une période intense pendant laquelle nous réalisons plus que jamais l’interdépendance des économies mondiales. Le Comité Souveraineté et Sécurité économiques que j’ai créé à mon arrivée au Medef aura des leçons à tirer de cette crise. La crise que nous traversons, le confinement pour la plupart, c’est une occasion de rapprochement en famille. Mais c'est aussi un test de sang-froid et de calme. Je souhaite à chaque lecteur de la Quotidienne de traverser cette épreuve au mieux, avec courage et avec patience.

À lire pour aller plus loin :

La lettre solennelle adressée à tous les chefs d’entreprises de France, par Geoffroy Roux de Bézieux, Président du Medef.

À l’attention de tous les chefs d’entreprises de France

Paris, le 19 mars 2020

Madame, Monsieur,

La crise que nous traversons, d’abord sanitaire mais aussi économique est d’une ampleur inédite. C’est un défi pour notre génération, peut-être aussi grand que le furent la grippe espagnole ou la crise de 1929.

Dans ces circonstances exceptionnelles, nous devons toutes et tous faire preuve d’unité, de calme et de détermination, pour faire face ensemble aux enjeux colossaux à affronter. Aux côtés des dirigeants politiques de notre Nation qui sont confrontés à des décisions cruciales, aux côtés de l’Etat qui met en jeu des soutiens financiers sans précédents pour les entreprises, aux côtés surtout de la communauté médicale qui se bat sans relâche sur le front sanitaire, nous devons assurer pleinement notre part du fardeau, tout aussi essentielle : dans la guerre contre cette épidémie, le monde économique constitue les « forces arrières », celles qui doivent fournir aux soignants les moyens de mener le combat et à tous nos concitoyens les moyens de vivre.

Chefs d’entreprises, dirigeants d’un grand groupe, d’une PME ou d’une TPE, d’une société cotée ou d’une entreprise familiale, dirigeants salariés ou actionnaires de nos entreprises, nous avons donc toutes et tous un rôle déterminant dans la solidité et la résilience de l’outil de production. Nous devons assurer la continuité de l’activité dans les domaines vitaux bien sur, mais aussi dans tous les domaines connexes, puisque notre économie est intégrée et les secteurs interdépendants les uns des autres.

Il nous faut donc impérativement continuer à produire pendant cette période de confinement. Pas pour des raisons strictement économiques et financières – encore que notre capacité collective à produire conditionne la possibilité pour l’Etat de continuer à emprunter sur les marchés, donc à garantir notre système bancaire et le financement de toute notre économie... Mais surtout pour ne pas ajouter à la crise sanitaire une crise de carence dans l’approvisionnement de nos concitoyens.

C’est pourquoi nous devons collectivement être très clairs et responsables dans les règles relatives au travail qui s’appliquent durant cette période. En effet, si l’on excepte les personnes malades ou celles qui sont prises en charge par la Sécurité Sociale pour garde d’enfants, les salariés des entreprises françaises relèvent aujourd’hui de trois catégories :

  • celles et ceux dont le travail est possible à distance depuis leur lieu de confinement et qui sont donc en télétravail ;
  • celles et ceux qui travaillaient dans des lieux accueillant du public fermés par les arrêtés du ministre de la santé des 14 et 15 mars derniers (les commerces, bars ou restaurants,… à l’exception des pharmacies, de l’agro-alimentaire, des banques, des bureaux de tabac et des stations essence) après l’allocution télévisée du Premier ministre le samedi 14 mars : ils sont en congés, en RTT ou en chômage partiel ;
  • celles et ceux qui ne sont pas concernés par les fermetures des lieux accueillant du public mais qui ne peuvent pas non plus exercer leur profession en télétravail, c’est-à-dire l’essentiel des salariés de l’industrie et des services : ils sont normalement sur leurs lieux de travail pendant les heures de travail, dès lors que leurs employeurs ont pu adapter l’organisation pour assurer leur sécurité sanitaire et si l’activité n’est pas empêchée par des ruptures d’approvisionnement.

Aussi nous vous demandons instamment, dans toutes les entreprises ou c’est possible, d’examiner sans délai les aménagements nécessaires aux postes de travail pour permettre la sécurité sanitaire des salariés et la poursuite de l’activité, en toute sécurité et dans le respect des gestes barrières et de règles de distanciation. Ces aménagements doivent être faits en étroite concertation avec les Instances Représentatives du Personnel dans vos entreprises. Dans cette période particulière, un dialogue social intense dans l’entreprise est indispensable. Ecouter, rassurer, et trouver des solutions pour continuer.

D’autres pays comparables, durement affectés par le Covid-19, ont su maintenir un haut niveau d’activité tout en mettant en œuvre les moyens de lutte contre la pandémie. Notre pays doit pouvoir faire aussi bien.

En ce qui concerne les relations entre entreprises, nous vous appelons solennellement à adopter une ligne de conduite solidaire, notamment dans la gestion de vos relations contractuelles entre clients et fournisseurs, entre donneurs d’ordres et sous-traitants, entre banquiers et entreprises, entre créanciers et débiteurs, y compris dans le crédit inter-entreprises. Les délais de paiements doivent être assouplis le plus possible et les pénalités de retard suspendues, afin que ceux qui sont en manque de trésorerie puissent bénéficier du soutien de ceux qui en ont. L’Etat donne l’exemple en reconnaissant la clause de force majeure dans ses marchés publics et les collectivités locales, incitées par les organisations patronales, ont indiqué faire de même. Soyons ensemble irréprochables les uns envers les autres.

Dans la terrible épreuve que nous traversons, vous faites preuve d’un esprit collectif, d’une réactivité et d’un sens des responsabilités remarquables : plus que jamais l’Entreprise sera, grâce à vous toutes et tous, la solution !

En souhaitant à chacune de vos entreprises de traverser cette crise au mieux, nous restons solidairement à vos côtés pour vous aider à trouver des solutions et continuer à relayer vos demandes auprès des pouvoirs publics. Et nous vous prions d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de nos sentiments les meilleurs.

Parole de Dirigeant - Geoffroy Roux de Bézieux et Patrick Martin

Geoffroy Roux de Bézieux, Président du Medef

Patrick Martin, Président délégué Medef

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