Kellogg’s : Créée en 1906 aux Etats-Unis, l’entreprise Kellogg's développe des gammes de céréales du petit-déjeuner. Le groupe commercialise plusieurs marques de céréales telles que Frosties, Miel Pops, Trésor, Special K ou encore Coco Pops. Kellogg's produit également des barres de céréales et les produits de la marque Pringles. Au fil des années, Kellogg's s'est implanté dans plusieurs parties du monde, à savoir en Europe, en Asie, en Amérique du Sud ou encore en Afrique. Le chiffre d'affaires du groupe s'élevait à 13 milliards de dollars en 2019. Leader sur le marché des céréales petit-déjeuner avec 40% de part de marché, Kellogg’s France compte 200 employés pour 345 millions d’euros de chiffre d’affaires.

L’Association National de Développement des Epiceries Solidaires (ANDES) est le réseau pionnier des épiceries solidaires et l’un des principaux acteurs de l’aide alimentaire en France. Depuis plus de 20 ans, ANDES donne les moyens aux familles à faibles revenus d’accéder à une alimentation diversifiée et de qualité à prix réduit. ANDES développe également des solutions d’approvisionnement en fruits et légumes frais pour des structures d’aide alimentaire (épiceries solidaires ou autres structures d’aide alimentaire). Ses chantiers d’insertion, situés dans les marchés de gros de Rungis, Lille, Perpignan et Marseille, luttent contre le gaspillage alimentaire en revalorisant les invendus des professionnels de la filière fruits et légumes, créant des dispositifs pour accompagner les personnes éloignées de l’emploi. En 2020, le réseau compte 400 épiceries et accompagne près de 200 000 personnes. Ses chantiers d’insertion ont distribué plus de 3 000 tonnes de denrées.

Yann Auger, Directeur général, Réseau ANDES

Éric Le Cerf, Président-Directeur Général de Kellogg’s France

Pouvez-vous définir les contours de votre partenariat et de votre projet commun ?

Éric Le Cerf : Kellogg’s est une entreprise fondée par un visionnaire, Will Keith Kellogg, un grand industriel mécène doté d’une vision avant-gardiste et progressiste. Il disait que la vocation de Kellogg’s était « d’offrir une alimentation végétale pour le bien-être de tous ». Kellogg’s a lancé en 2013 un programme Breakfasts for better days dont l’axe principal est la lutte contre la précarité alimentaire. Il est donc naturel pour nous d’intervenir sur ces questions avec les acteurs de l’aide alimentaire en France. Nous sommes conscients que le petit-déjeuner est un repas très important, particulièrement pour des jeunes en pleine croissance et malheureusement 30 à 40 % des jeunes ne prennent pas de petit-déjeuners tous les jours, avec des conséquences importantes sur l’attention scolaire. Cela est d’autant plus vrai chez les populations en situation de précarité. En 2020, 119 ateliers petit-déjeuner ont eu lieu dans 29 épiceries solidaires et ont rassemblé 1 350 personnes. En parallèle, nous avons distribué environ 20 219   kits petit-déjeuner et nous avons donné 34 tonnes de produits alimentaires en soutien à l’aide d’approvisionnement dans les chantiers d’insertion. En 2020, nous sommes devenus le premier partenaire bienfaiteur du fond lancé par ANDES avec un don de 200 000 euros qui doit permettre la création de 25 épiceries et le soutien à 10 épiceries existantes. Cela a été un beau moment pendant une année difficile et créé beaucoup de fierté en interne pour nos collaborateurs.

Yann Auger : Nous avons commencé à travailler ensemble en 2019. A ce moment-là il y avait une forte volonté politique pour proposer des petits-déjeuners dans les écoles afin que chaque enfant puisse avoir accès à un petit-déjeuner le matin. Des solutions concrètes étaient recherchées et ANDES a étudié la possibilité d’impliquer les épiceries solidaires de son réseau. Nous avons été mis en relation avec Kellogg’s par une mairie. Très vite, nous avons construit ensemble un premier programme socle avec deux axes principaux. Le premier consiste en la mise en place d’ateliers de sensibilisation autour du petit-déjeuner dans les épiceries solidaires avec le soutien de Kellogg’s. Les équipes des épiceries solidaires ou des nutritionnistes ont animé des ateliers pédagogiques permettant également de cuisiner et de partager ensemble son petit-déjeuner. Nous partageons le constat de l’importance d’un petit-déjeuner équilibré, en particulier pour les populations précaires qui ont des difficultés d’accès à l’alimentation. L’accompagnement et la création de lien social sont des missions majeures pour les épiceries solidaires. Cela se traduit par plus de 12 000 ateliers par an dans notre réseau. Le deuxième axe est celui de la mise en vente dans les épiceries de kits petit-déjeuner aux familles, avec tous les aliments nécessaires pour un petit-déjeuner équilibré. Nous avons conclu un accord avec Kellogg’s à la rentrée 2019 pour un déploiement fin 2019. Notre programme fut vite ralenti par la crise sanitaire, en particulier les ateliers, mais nous continuons à accueillir des participants. En parallèle, Kellogg’s réalise des dons réguliers de produits (invendus ou pas).

 

Pouvez-vous nous en dire plus sur l’implication du collectif sur ce projet, au sein de l’Entreprise Kellogg’s ?

Éric Le Cerf : En plus de nos dons financiers et de produits, nous avons lancé un appel en interne aux dons avec proposition d’abondement de l’entreprise pour participer à la création de nouvelles épiceries ANDES. Plus de 20 collaborateurs ont répondu positivement. De façon générale, la lutte contre la précarité alimentaire est l’un des 3 piliers de notre stratégie RSE. L’implication de nos collaborateurs se fait historiquement par leur participation deux fois par an à des journées de collecte nationale. La participation à ces journées dédiées est encouragée par le comité de direction qui participe lui-même à ces journées de collecte dans les points de vente en région. Notre implication n’est donc pas seulement financière et ne se situe pas qu’au niveau de l’entreprise. C’est aussi du don de temps par les collaborateurs avec plus de 70% des collaborateurs du siège qui y participent.

 

Quel(s) bénéfice(s) voyez-vous, respectivement, à ces actions en commun ?

Yann Auger : L’idée de créer 100 nouvelles épiceries et de promouvoir ce modèle spécifique a été accéléré par la crise. Face à l’explosion des besoins, il nous a semblé plus que jamais important de promouvoir notre modèle d’action spécifique. Nous avons officialisé cette volonté en lançant une collecte de fonds le 11 mai, jour du déconfinement. Le fait que Kellogg’s soutienne fortement cette démarche a enclenché tout le reste. Ce premier engagement nous a permis d’amorcer et de sécuriser ce projet et de lancer l’appel à candidatures dès le mois de Juillet. Cela aurait été impossible autrement.

Concernant les collaborateurs, outre la participation financière, nous proposons à nos partenaires des démarches de parrainage des nouvelles épiceries. Cela crée un lien privilégié entre les épiceries et les partenaires qui ont financé leur lancement. C’est le cas des 2 nouvelles épiceries du Havre qui sont officiellement parrainées par Kellogg’s. Cela donne une dimension plus concrète à ces actions et sert de levier pour impliquer davantage leurs collaborateurs.

Éric Le Cerf : Nous avons mesuré l’importance des sujets sociétaux pour les candidats que nous recherchons. Cela venait en critère numéro un ou deux du choix des futurs candidats, qu’ils soient juniors ou pour des postes de management. Il y a une profonde recherche de sens avec la réalisation croissante que l’entreprise impacte la société par les produits qu’elle propose, sa culture et ses actions. La consommation est un acte militant. Que notre entreprise ait au cœur de sa stratégie une ambition RSE est quelque chose d’important et qui résonne chez les candidats lors du processus de recrutement. C’est aussi cette fibre sociétale, cette énergie, que l’on cherche chez les candidats, pour faire bouger les lignes et pour avancer.

 

En termes d’impact, quel est l’apport de ce partenariat ? S’agit-il pour Kellogg’s d’un enjeu business pur intégré à la stratégie ou plutôt de mécénat ou de philanthropie ?

Éric Le Cerf : Cela s’inscrit dans la stratégie de l’entreprise de façon formelle et publique car Kellogg’s vient de faire évoluer sa vision et sa mission d’entreprise qui est de « créer des jours meilleurs, et une place à table pour tous, grâce à nos marques reconnues ». C’est celle d’un monde bon et équitable où les gens ne sont pas juste nourris mais épanouis. L’action RSE, notamment sur la précarité alimentaire, fait partie de notre héritage et de notre ambition. En termes d’impact business, nous mesurons l’impact de nos actions sur notre réputation, le degré d’engagement de nos collaborateurs mais aussi auprès de nos clients distributeurs. Nous avons vu nos scores de mesure RSE progresser de 6 places cette année chez nos clients distributeurs comme Carrefour, Auchan, Leclerc, Intermarché ou Système U. C’est la preuve que notre engagement est compris et reconnu. A l’heure où beaucoup de repères sont bousculés, il est important de retrouver le sens de ces enjeux pour l’entreprise, les marques mais aussi les distributeurs et les consommateurs.

Yann Auger : De notre côté, l’impact du partenariat transparait à travers quelques chiffres : Kellogg’s nous a fait don de 34 tonnes de produits alimentaires sur les 1 an et demi de partenariat – ce qui est très significatif. La création prochaine de 25 épiceries, grâce au soutien de Kellogg’s, revient à offrir des solutions d’aide alimentaire et d’accompagnement à environ 11 000 personnes par an.

 

Est-ce que tout cela vous donne envie d’aller plus loin ? Si oui, sur quel axe ? Et pour Kellogg’s, à quand la sortie d’un produit durable, responsable et éthique ?

Éric Le Cerf : Nous travaillons en permanence sur notre offre de produits, soit pour rénover les marques existantes, en réduisant la teneur en sucre ou en sel, en améliorant le profil Nutri-score ou la part de céréales complètes, ou en créant des nouvelles gammes bio. Ceci est au cœur de notre stratégie. Nous avons la volonté de constamment améliorer nos recettes et leurs qualités nutritionnelles. En parallèle, nous travaillons à la réduction de notre empreinte environnementale en développant de nouveaux packaging. D’ici 2025, 100% des emballages de nos produits seront recyclables, réutilisables ou compostables. Nous avons signé la charte d’Ellen McArthur.

Sur la possibilité d’aller plus loin, je pense à deux choses uniques chez ANDES : en termes de positionnement par rapport aux bénéficiaires, nous ne sommes pas dans le don - qui est une forme d’aide essentielle – mais dans une proposition centrée sur le respect de la dignité de la personne, d’autant que l’action d’ANDES propose un accompagnement social dans des points de vente ancrés géographiquement. Chacun d’entre nous peut intervenir dans des ateliers petit-déjeuner ou dans une épicerie pour faire le don d’une journée. C’est un partenariat ancré dans le temps, amené à se développer concrètement, dans les territoires.

Yann Auger : Le projet va aussi probablement se développer avec une approche multi-partenariale avec Too Good to Go et la mise en vente de paniers sur l’application à destination du grand public attiré vers les épiceries. C’est un projet innovant auquel on croit beaucoup. Nous souhaitons y associer nos partenaires privilégiés comme Kellogg’s. Nous avons beaucoup d’idées et serons amenés à leur faire de nouvelles propositions.

 

Dans une récente interview d’Entreprises de demain, Nathalie Gonzalez de Nespresso France expliquait son rôle d’initiateur auprès des autres filiales nationales. Est-ce que vous avez cette influence au sein d’un grand groupe international comme Kellogg’s ?

Éric Le Cerf : Nous appartenons en effet à un grand groupe international mais notre rôle d’impulsion est réel. La France est le 2ème marché pour Kellogg’s en Europe et le déploiement de la politique RSE reste très lié aux relations avec les structures locales. Il n’y a donc pas d’équivalent à notre partenariat avec ANDES ailleurs. Nous avons un rôle d’impulsion sur de nombreuses autres initiatives déployées spécifiquement en France. Nous avons par exemple adopté volontairement le Nutri-Score en 2020, lancé une gamme Extra bio et nous testons en France une offre vrac. Nous essayons donc de faire bouger les lignes.

 

Avez-vous rencontré des difficultés à surmonter dans le cadre de votre partenariat  ?

Éric Le Cerf : Sur le plan de nos actions avec ANDES, dans le domaine de l’aide alimentaire, il n’y a pas vraiment eu de difficulté mais pour certaines de nos actions RSE, il y a des défis à relever. Dès lors que l’on veut faire un travail sur son empreinte environnementale ou sur ses approvisionnements en matières premières agricoles, cela induit un coût supplémentaire. Par exemple, le carton recyclé est plus cher que le carton vierge. Comment développer son ambition tout en pérennisant la performance économique de l’entreprise ? La pression économique est notre difficulté principale.

Yann Auger : Kellogg’s France n’est pas une énorme entreprise et nos interlocuteurs sont très accessibles. Une fois notre partenariat acté, les actions se sont mises en place très rapidement.

 

Avez-vous des partenariats avec des structures similaires ? Souhaitez-vous aller plus loin ?

Yann Auger : Le développement de partenariats privés est un axe fort depuis 2 ans. D’autres gros partenariats existent mais chacun est spécifique. Nous proposons des choses un peu différentes selon les envies et les potentialités de chacun. Nos actions avec Kellogg’s sont spécifiques et s’articulent autour du petit-déjeuner. Généralement, nous avons une mécanique un peu similaire avec chaque partenariat : nous construisons un programme commun lié au cœur de métier du partenaire avec possibilité d’ouverture sur d’autres axes moins liés à leurs préoccupations initiales.

Éric Le Cerf : ANDES est un partenaire assez unique pour Kellogg’s. Nous avons accompagné historiquement les Banques Alimentaires, Les Restau du Cœur, mais à mon sens, le partenariat avec ANDES est unique car il comporte des actions multiples. Il y a avec ANDES des pistes intéressantes, notamment celle d’un partenariat tripartie avec Too Good to Go. C’est un partenariat positif dans la mesure où il est propice à ouvrir les portes d’un écosystème plus large.

Les facteurs clés de succès du partenariat

Par Yohann Marcet, Directeur de GROUPE SOS Consulting

Aujourd’hui, le partenariat entre le réseau d’épiceries ANDES et Kellogg’s France est visiblement une réussite. Plusieurs programmes ont été mis en place et démontrent l’intérêt réel que le géant de l’agroalimentaire porte au réseau d’épiceries locales, sociales et solidaires. Ce sont plusieurs milliers de familles qui ont vu leur quotidien s’améliorer grâce à ce partenariat. Si ce partenariat a pu autant se développer depuis 2019, c’est tout d’abord grâce à l’engagement de la direction pour faire vivre la vision du fondateur de leur entreprise qui souhaitait donner accès à une alimentation saine au plus grand nombre. Comme évoqué dans cet entretien, cet engagement n’est pas simplement financier ou sous la forme de dons de produits, comme cela se fait régulièrement, mais aussi en termes de temps. Les collaborateurs et collaboratrices de Kellogg’s France sont régulièrement encouragés par leur direction à agir au profit de populations plus vulnérables, que ce soit par leur participation à des ateliers petit-déjeuner, des journées de collecte ou des dons. Ce partenariat vit donc à travers les acteurs de chacune des deux entités. L’effet bénéfique n’est donc plus uniquement au profit des bénéficiaires du programme d’aide alimentaire et d’accompagnement d’ANDES. Il est aussi au profit de ceux qui le soutiennent car il est générateur de satisfaction liée au sentiment de contribuer à une démarche positive. Ce partenariat a de beaux jours devant lui grâce à l’engagement humain des deux entités. Cela présage de beaux projets communs pour l’avenir !