Nous ne pouvons plus dépendre excessivement d’une production délocalisée pour certains produits

Le PDG d'Axyntis, acteur-clé de la chimie fine made in France, estime que l’épidémie de Covid-19 a rendu plus stratégique encore le renforcement de l’autonomie française en matière de production de principes actifs, aujourd’hui largement délocalisée en Chine et en Inde, notamment pour la filière pharmaceutique. Face à cette crise d’une ampleur inédite, Axyntis a réussi à se mobiliser très rapidement pour rester opérationnel tout en garantissant la sécurité des salariés. À présent engagé dans la lutte contre le Covid-19 en tant que producteur de principes actifs pharmaceutiques, mais également au service des personnels soignants dans les régions où sont implantés ses sites, le groupe de David Simonnet constate qu’une crise peut être l’occasion d’une relation réaffirmée entre l’entreprise et ses financeurs, et qu’elle implique en tout cas pour chacun de faire preuve de courage.

Institut de l’Entreprise – David Simonnet, comment votre groupe, Axyntis, fait-il face à cette crise ?

David Simonnet - Je crois que nous avons commencé, comme beaucoup d’entreprises, par une phase de sidération. L’ampleur de cette crise est incroyable. Le Groupe Axyntis, c’est la chimie fine « made in France », une ETI industrielle créée en 2007, qui a fait le pari de devenir en peu de temps un acteur clé de la production de principes actifs en France. Dans cette crise qui implique de près la production de médicaments, donc dans la chimie fine, la priorité était de rester le plus opérationnel possible. Nous avons immédiatement cherché à renforcer la sécurité de nos 460 salariés qui sont répartis dans cinq usines le territoire national. Une situation qui a également renforcé le besoin d’accompagner sur le plan managérial. L’autre mise en sécurité à gérer, c’était celle de notre financement. Face à cette crise, c’est aussi une mobilisation exemplaire des équipes du Groupe qui ont mis à disposition du personnel médical, hospitalier et libéral, dans les cinq territoires où nous sommes implantés, une partie de nos stocks de masques ou de combinaisons. Axyntis a également mis en œuvre une production de gel hydro-alcoolique à destination de ces soldats de la première ligne qui suscitent notre admiration.

Comment s’est passée la mise en sécurité financière ?

Nous étions en pleine levée de fonds lors de l’apparition du Covid-19. La crise économique liée a eu un réel impact sur cette démarche. Dans cette phase financière cruciale, nous rencontrons un soutien actif des banques et de Bpifrance. Les crises sont l’occasion de resserrer les liens avec ses partenaires d’affaires. Cette crise a aussi contribué à mettre en lumière l’intérêt stratégique de notre projet industriel, axé sur la souveraineté nationale en matière de production de principes actifs qui font l'efficacité thérapeutique, notamment pour la filière pharmaceutique.

En effet, le grand public a découvert que plus de 80% des molécules des médicaments sont produites en Chine ou en Inde. Est-ce que la crise du Covid-19 va changer quelque chose à cela ?

Il y a déjà des changements, une prise de conscience que cette crise aura des impacts géostratégiques. Le médicament est plus que jamais au cœur de ces enjeux. Le Gouvernement plaide par la voix de Bruno Le Maire pour recouvrer une indépendance industrielle et donc sanitaire quant à l’accès aux principes actifs qui font l’efficacité thérapeutique du médicament. Nous serons un acteur de cette reconquête et sur le court terme pour aider à la lutte contre le Covid-19. Depuis les années 1980, nous avons laissé la production de nombreux principes actifs migrer vers la Chine et l’Inde, pour des questions de coûts. À la lumière de cette crise, il y a une prise de conscience sur le fait que nous ne pouvons plus dépendre excessivement d’une production délocalisée pour certains produits. Il est plus que temps : un site de production de chimie fine ne s’improvise pas. Il faut plus de 3 ans et plus de 100 millions d’euros pour le mettre en route.

En dehors d’Axyntis, vous êtes connu pour votre « Que Sais-je » Les 100 mots de l’entreprise, édité aux PUF. Est-ce que vous en ajouteriez un 101ème à la suite de l’épisode que nous vivons actuellement ?

Cela demande réflexion ! Et pour l’instant nous sommes plongés dans l’action. Rendez-vous dans quelques mois pour cela ! En revanche, il y a un mot que je veux souhaiter à tous ceux qui lisent La Quotidienne des Entreprises En Action. C’est le courage. En ce moment, nous en avons tous besoin. Que nous soyons sur le terrain ou confinés, nous devons être courageux. Il y a des situations dans la vie de l’entreprise où nous devons faire passer le devoir avant nos projets immédiats. Nous devons être au rendez-vous d’un effort sanitaire sans précédent. Et pendant ce temps-là, malgré toutes les précautions, nous pouvons être touchés par l’irruption de l’épidémie dans notre vie ou celle de nos proches, donc j’adresse une pensée particulière à tous ceux qui sont touchés. Courage !

*Bpifrance, Banque Publique d'Investissement

David Simonnet, Président-Directeur Général d’Axyntis

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