Entré dans une phase progressive de sortie de crise, Saint-Gobain considère - en tant que leader de son secteur – que son rôle est d’informer les gouvernements sur les réalités du terrain afin d’éclairer l’élaboration des plans de relance. Si le Groupe a déjà rouvert des points de vente et des usines sur la base du volontariat, avec toutefois des situations très variables en fonction des pays et des secteurs d’activité, il demeure confronté à la question du retour de la demande – de son niveau et de ses modalités. En parallèle, le Groupe se projette déjà sur ce que sera la « nouvelle normalité ». Force est déjà de constater que cette crise a bousculé certains modes d’organisation, non sans bonnes surprises, et qu’elle a accéléré l’adoption du digital dans un secteur où les choses n’avançaient que doucement. Par ailleurs, le Groupe se félicite que son modèle multi-local, qui privilégie les circuits courts, a été un réel atout et sorte conforté de cette crise. Deux autres éléments clefs ont permis à Saint-Gobain de faire face à celle-ci. D’une part, la coordination au niveau Groupe, au moyen d’une réunion quotidienne du Comex, d’une crise gérée aux plus près des réalités du terrain par chaque dirigeant de région, pays ou entité. D’autre part, le PDG Pierre-André de Chalendar et le Directeur Général Délégué Benoit Bazin ont mis en place une communication directe, régulière et précise, entre les managers et envers les salariés, afin de rassurer, d’informer et de donner l’impulsion.

 

Date de publication : 28/04/2020

Enquête réalisée auprès de Maud Thuaudet, Directrice de la Stratégie et Laurence Pernot, Directrice de la Communication de Saint-Gobain

 

Une gestion locale de la crise, appuyée par une coordination au niveau du Groupe

Le Groupe, implanté en Chine, a vécu l’arrivée de la crise à travers les premières mesures mises en œuvre sur place dans ses implantations chinoises, avec néanmoins une distance qu’il reconnaît aujourd’hui : « Nous avons au début eu le biais de penser que cette crise allait s’arrêter aux frontières de la Chine, comme ce fut le cas pour le SRAS ». La gestion de crise a néanmoins connu une montée en puissance rapide. « Quand l’Europe a commencé à être touchée, des décisions ont été prises très rapidement : travel ban, distanciation sociale, etc. En quelques heures des mesures étaient prises et communiquées à l’ensemble du Groupe ». Ces réponses ont été inspirées par celles prises par les entités du Groupe implantées en Chine, qui avaient rapidement mis en oeuvre des mesures afin en premier lieu de préserver la santé des collaborateurs, mais aussi d’arrêter des usines confrontées à des chutes trop importantes de demande, ou encore assurer un contact étroit avec les clients. Un « transfert des savoirs » s’est opéré au moyen notamment d’une réunion quotidienne du Comex, « qui a permis d’être réactifs au fur et à mesure que les pays étaient touchés ». Au-delà des transferts de bonnes pratiques, ces échanges se sont également matérialisés par un approvisionnement, depuis les entités en Chine, en masques et autres équipements de protection.

Conformément à l’organisation décentralisée du Groupe, chaque dirigeant de région, pays ou entité a pour mission de gérer localement la crise (en appliquant les décisions des autorités publiques, en conduisant les échanges avec les syndicats, etc.) : « La gestion de crise a été et reste locale, mais avec une coordination mondiale. Chacun a pour priorité numéro un la santé de ses collaborateurs, la poursuite des opérations dans la limite de la sécurité, puis le contrôle de la trésorerie avec notamment des limitations rapidement décidées sur les investissements non essentiels ». Une décentralisation d’autant plus nécessaire que la réponse des pays dans lesquels est implanté le Groupe n’a pas été identique : « On parle de reprise, mais dans plusieurs pays l’activité n’a pas été arrêtée : c’est le cas notamment de l’Allemagne, des pays nordiques, des pays de l’Est ou encore du Canada ». Une coordination demeure néanmoins essentielle, afin à la fois d’assurer un partage d’informations et de bonnes pratiques mais aussi pour appréhender harmonieusement la sortie de crise.

Une coordination renforcée par un lien direct entre les dirigeants du Groupe et leurs équipes : « La communication, à la fois entre dirigeants et envers les employés, est un axe essentiel de la gestion de crise. Pierre-André de Chalendar et Benoît Bazin communiquent de façon régulière et précise et donnent ainsi une impulsion, un guide, à l’ensemble du Groupe ». Une communication directe qui s’est notamment avérée essentielle dans ce qui a constitué la « phase d’urgence », le début de crise, lors de laquelle une communication omniprésente, portée au plus haut niveau de l’entreprise, a permis de séquencer la réponse du Groupe. « Notre Président crante ainsi chaque phase : il y a eu la phase d’urgence, nous sommes aujourd’hui dans la phase de reprise, avant d’engager la phase de relance ». Le PDG y présente sa vision, les grands axes stratégiques à déployer, et s’appuie sur son Directeur Général Délégué pour leur mise en œuvre, avec le soutien de la communication. « Cette omniprésence du top management est importante : il s’agit de rassurer, de montrer qu’il y a un pilote dans l’avion. Sur-information et coordination sont les clefs essentielles en période de crise ».

 

Une reprise de l’activité engagée

« Nous sommes désormais dans la phase de reprise , dans laquelle nous bénéficions, comme pour l’entrée dans la crise, d’une bonne coordination entre nos pays d’implantation. Nous avons pour cela du repenser les méthodes de travail, à la fois dans nos usines et dans nos points de vente. La clef aujourd’hui va être de faire rebondir les économies, et cela dépasse le management local ».

Le Groupe se montre particulièrement attentif aux mécanismes et plans de relance qui vont pouvoir être mis en place dans les différents pays où il est implanté. « En France, et plus généralement en Europe, des plans de relance sont en discussion. Le sujet est également évoqué en Chine, où la consommation est repartie mais n’a pas encore retrouvé ses niveaux d’avant crise. Nous suivons de près ces perspectives ». Leader de son secteur, le Groupe considère qu’il a un rôle important à jouer afin d’éclairer les gouvernements, d’« expliquer ce qu’il se passe sur le terrain : est-ce que les chantiers reprennent effectivement ? Quelle est la réaction des petits artisans ? La réponse à ces questions, que nous pouvons apporter, a vocation à compléter les analyses économiques qui sont faites par ailleurs ».

Le Groupe a à ce stade rouvert points de vente et usines sur la base du volontariat, avec une situation très variable en fonction des pays, mais également des secteurs d’activité où il opère : si l’activité du marché de la science de la vie a fortement accéléré, celui de la construction a souffert. Ce dernier a été fortement ralenti en France à l’annonce du confinement avant de repartir, mais aussi dans la moitié des États-Unis (dans les États où il n’était pas considéré comme une activité essentielle) ou encore en Inde. La reprise aujourd’hui est réelle, locale et progressive.

 

Innovations incrémentales, numérique, circuits courts : les premiers enseignements de la crise

« La prochaine étape est de se projeter sur ce que sera la « nouvelle normalité », ce que cette crise va changer dans notre environnement ».

Dans l’ensemble des pays où le Groupe est implanté, un travail a été étroitement mené avec les partenaires sociaux, afin notamment d’informer sur la situation de l’entreprise ou sur les nouvelles modalités de travail dans les usines. Une organisation repensée qui n’a pas été sans (bonnes) surprises : « La crise a bousculé certaines pratiques existantes : organisation des plages horaires, division des tâches à l’intérieur d’une ligne de production, etc. La contrainte sanitaire, par les limitations qu’elle implique, peut parfois nous rapprocher du concept indien de Jugaad[1], et parfois faire naître des améliorations de process dont il y aura des enseignements à tirer ».

Autre enseignement, devenu une conviction : le renforcement du numérique. « Cette crise accélère l’adoption du digital dans un secteur où son développement était encore moins rapide ». Le Groupe prévoit ainsi d’accélérer encore ses plans de digitalisation, face notamment à l’évolution du comportement de ses clients, « qui traditionnellement pouvaient être assez conservateurs sur le sujet et font désormais preuve d’une vitesse d’adoption étonnante ».

Le Groupe se félicite par ailleurs de son modèle multi-local, qui privilégie les circuits courts. « Nos chaînes de valeur au plus près de nos marchés seront un réel atout si le renforcement de ce modèle avec la crise se confirme ». Le Groupe travaille également sur les nouvelles attentes en matière de consommation qui pourraient émerger de la crise, à la fois en termes de produits et d’usage : « nous devons nous montrer agiles et réactifs sur ces sujets, qui pourraient constituer des opportunités à saisir ».

 

Une mobilisation de l’appareil productif pour servir les besoins des soignants

Au-delà des dons de gants, masques et combinaisons faits aux hôpitaux, le Groupe a réorganisé une partie de sa chaîne de production pour répondre aux besoins des soignants. Aux États-Unis, certaines de ses usines se sont ainsi mises à fabriquer des gels hydroalcooliques. Les cadences ont par ailleurs accéléré dans les unités qui travaillent pour les sciences de la vie, notamment pour la fabrication de composants utiles à des équipements type respirateurs artificiels. Le Groupe a également fourni des matériaux de construction pour des hôpitaux éphémères, en Grande-Bretagne, en Afrique du Sud ou au Brésil.

 

Des dons de dirigeants du Groupe à l’AP-HP et à la Fondation de France

Afin de préserver l’emploi et les compétences, le Groupe a rapidement eu recours au chômage partiel, mis en place dans plusieurs de ses principaux pays d’implantation, à commencer par la France . « Cette mesure s’est déployée avec le souci que tout le monde participe à cet « effort de guerre » : les points de ventes, les usines comme les sièges sont concernés ». Effort auquel les dirigeants de l’entreprise se sont associés, comme l’expliquait Pierre-André de Chalendar dans sa contribution à la Quotidienne des Entreprises en action : « Ces mesures ne peuvent pas légalement toucher les cadres dirigeants. Aussi ceux-ci ont-ils souhaité faire acte de solidarité et participer à l’effort collectif de l’entreprise, en faisant don d’une partie de leur salaire à l’AP-HP ou à la Fondation de France ».

 

 

[1] Ou innovation frugale, soit la démarche consistant à innover avec peu de moyens

 

 

Laurence Pernot, Directrice de la Communication de Saint-Gobain

Maud Thuaudet, Directrice de la Stratégie de Saint-Gobain

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